G2. LES SOCIÉTÉS ET LES RISQUES :

ANTICIPER, RÉAGIR, SE COORDONNER ET S’ADAPTER

G2. LES SOCIÉTÉS ET LES RISQUES :

ANTICIPER, RÉAGIR, SE COORDONNER ET S’ADAPTER

I/ Les risques majeurs : définition

Lorsqu’on évoque les risques majeurs qui peuvent menacer les sociétés humaines, les aléas naturels apparaissent en premier lieu. On parle d’aléa naturel lorsqu’un phénomène naturel exceptionnel se produit mais n’impacte pas les sociétés humaines. Cet aléa est qualifié de catastrophe lorsque celui-ci frappe les sociétés et occasionne des dégâts humains et matériels.

On peut ainsi distinguer différents types d’aléas liés à différents phénomènes naturels : activité volcanique, tellurique (tremblements de terre, glissements de terrain), phénomènes liés à l’eau (inondations, tsunamis, sécheresses), au vent (tempêtes, tornades, ouragans, typhons, cyclones, blizzards), au feu (incendies) ou encore à l’activité des corps célestes (chute d’objets célestes, tempêtes solaires). Beaucoup de ces aléas sont liés entre eux, comme les tsunamis qui sont provoqués par des tremblements de terre ou encore les inondations qui peuvent faire suite à un ouragan. Certains de ces aléas frappent brutalement tandis que d’autres sont plus lents, et leurs impacts sur les sociétés humaines peuvent être extrêmement variables. En effet, les catastrophes les plus importantes au regard du nombre de victimes sont provoquées par les séismes et les tsunamis (entre 50.000 et 100.000 morts lors du séisme qui a frappé la Turquie en février 2023, entre 200.000 et 300.000 morts lors du tsunami de 2004) tandis que les inondations et les incendies provoquent surtout des dégâts matériels, parfois considérables.

Il est à noter que certains de ces phénomènes sont très liés au changement climatique, un bouleversement qui provoque à la fois une amplification et à la fois une multiplication de ces phénomènes. Ainsi la montée progressive du niveau des océans, un phénomène directement lié au réchauffement du climat, constitue une catastrophe naturelle en cours et sera selon de nombreuses estimations la pire catastrophe naturelle jamais observée, avec des impacts humains et matériels d’une ampleur jamais vue.

 

Contrairement aux aléas naturels, les risques industriels sont d’origine purement humaine. Certaines activités industrielles peuvent en effet mener à des risques en cas d’accident grave affectant les infrastructures concernées. On pense notamment au risque nucléaire en cas d’atteinte à l’intégrité des centrales, comme ça a été le cas à Tchernobyl (Ukraine) en 1986 ou à Fukushima (Japon) en 2011. Ces catastrophes nucléaires sont de nature à causer des dommages non pas immédiats mais dans le temps. En effet, celles-ci ne provoquent pas la mort d’un grand nombre de personnes dans l’immédiat mais les émissions de matériaux radioactifs dans l’environnement (air, eau, sol) contaminent durablement les écosystèmes ainsi que les personnes dans un rayon plus ou moins grand. Ainsi le nuage de Tchernobyl a parcouru des milliers de kilomètres et a survolé le ciel français, et la matière radioactive libérée dans l’océan Pacifique suite à la catastrophe de Fukushima s’est répandue sur des milliers de kilomètres carrés.

D’autres industries peuvent entraîner des catastrophes en cas d’accident, comme l’industrie pétrochimique (exemple de l’explosion de la plate-forme BP Deepwater Horizon en 2010). L’industrie de la chimie peut également provoquer de telles catastrophes, comme ça a été le cas en 2004 à Toulouse (explosion de l’usine AZF) ou encore à Rouen en 2019 (incendie de l’usine Lubrisol). Une nouvelle fois ces catastrophes ne sont pas de nature à provoquer un grand nombre de décès immédiats mais provoquent des dégâts environnementaux considérables.

Comme évoqué précédemment, de nombreuses catastrophes combinent plusieurs facteurs simultanés. Le cas de Fukushima en est une parfaite illustration : le 11 mars 2011, un fort séisme se produit au large des côtes japonaises, celui-ci engendre un tsunami, qui lui-même conduit à l’accident nucléaire de la centrale de Fukushima. Ces enchaînements de catastrophes peuvent avoir des effets dévastateurs sur les sociétés humaines, tant en termes de vies perdues que de dommages matériels et de pollutions. En 2011, cet enchaînement de facteurs a provoqué la mort de plus de 18.000 personnes et a occasionné des dégâts estimés à 210 milliards de dollars.

 

II/ Des sociétés inégales face aux risques

Face aux risques naturels, les sociétés humaines ne sont pas toutes aussi vulnérables. Certaines zones géographiques sont en effet excessivement exposées aux risques, tandis que d’autres apparaissent naturellement protégées. Concernant les risques sismiques, les zones du globe les plus exposées sont les zones de failles tectoniques (jonction des plaques), et on peut ici citer le Japon, la Turquie ou encore la Californie (faille de San Andreas).

De la même façon, certaines zones sont plus exposées aux vents violents que d’autres. Le Midwest américain constitue ainsi un terrain extrêmement favorable pour les tornades, les Caraïbes sont régulièrement soumises aux ouragans (ex. : l’ouragan Katrina de 2005, avec 1500 décès et plus de 100 milliards de dollars de dommages), et les îles du Pacifique aux typhons.

Le même constat peut-être dressé pour tous les types d’aléas, et certaines zones du globe cumulent ceux-ci (exemple du Japon). Le phénomène de réchauffement climatique amplifie cette vulnérabilité des territoires et fait craindre un abandon pur et simple de ceux-ci, en particulier ceux situés près des côtes et présentant une faible altitude (risques de submersion définitive, comme c’est le cas de nombreuses îles du Pacifique).

 

Lorsqu’on étudie l’impact des catastrophes de grande ampleur sur les sociétés humaines, on constate que les populations pauvres sont les plus touchées par ces événements exceptionnels. En effet, il faut d’une part souligner que les pays les plus pauvres rencontrent de très grandes difficultés à proposer une réponse efficace face aux catastrophes (organisation des secours et des recherches, mise à l’abri des sinistrés) en raison d’un manque de moyens matériels et financiers. Ces pays ne disposent souvent pas de plans d’urgence précis à appliquer en cas de catastrophe, leurs services de secours sont défaillants, et ils dépendent énormément de l’aide étrangère lorsqu’un événement de grande ampleur se produit. Cette problématique du manque de moyens a pu être constatée en 2010 à Haïti, un des pays les plus pauvres du globe, suite au séisme qui a frappé l’île et qui a entraîné la mort de plus de 200.000 personnes. Lors de cette catastrophe majeure, l’aide internationale a été indispensable afin d’éviter un bilan encore plus lourd, notamment lié aux conditions sanitaires des réfugiés (développement des maladies). Il faut d’ailleurs souligner le fait que ce bilan aurait pu être beaucoup plus faible si le pays avait disposé des infrastructures nécessaires à l’acheminement de l’aide humanitaire (infrastructures portuaires et aéroportuaires).

De la même façon, même au sein des pays développés les populations pauvres souffrent davantage des catastrophes. En effet, celles-ci sont souvent contraintes de vivre dans des zones à risque (zones inondables, zones à risque de glissement de terrain, couloirs des vents) où l’immobilier est moins coûteux. De plus les logements construits sont souvent de mauvaise qualité et résistent peu aux intempéries. L’ouragan Katrina de 2005 avait ainsi touché principalement les populations pauvres vivant en Louisiane dans des habitats peu résistants et construits en zones inondables. Cette catastrophe et la gestion de la crise qui s’en est suivie ont d’ailleurs provoqué un important scandale aux Etats-Unis, le gouvernement américain ayant été accusé de ne pas suffisamment protéger les populations les plus modestes, et en particulier les afro-américains.

 

III/ Les risques majeurs en France : prévention et gestion des catastrophes

Lorsqu’on examine le cas de la France, il convient de distinguer le territoire métropolitain des outre-mer. En effet, les aléas naturels et les risques industriels sont très différents dans les deux cas. Le territoire métropolitain est beaucoup plus vulnérable face aux catastrophes industrielles de par la présence de nombreuses usines et centrales et de par sa proximité avec les pays voisins européens, tandis que les outre-mer sont globalement épargnées par ces risques (peu d’industries, une situation insulaire éloignée ou des territoires voisins moins industrialisés).

En revanche les aléas climatiques sont, de manière générale, bien plus forts dans les outre-mer et ont tendance à toucher plus durement les populations. En effet, certains phénomènes naturels ne se produisent que sur ces territoires (ouragans, cyclones, tsunamis, activité volcanique). De plus, de nombreux territoires insulaires sont très directement menacés par la montée des océans, en particulier la Polynésie française, constituée d’une multitude d’îlots d’une altitude très faible (quelques mètres pour certains). En outre, les moyens de réponse en cas de crise majeure sont moins importants qu’en métropole.

Le territoire métropolitain est quant à lui soumis à divers aléas en fonction des régions : activité sismique de moyenne intensité, avalanches et mouvements de terrain dans les Alpes et les Pyrénées, feux de forêt dans le sud (Landes, Occitanie et Côte d’Azur), tempêtes sur la façade ouest, inondations au niveau des côtes et des plaines fluviales.

 

Afin de réduire l’impact de ces catastrophes naturelles et industrielles sur les sociétés humaines, de nombreuses mesures sont mises en place. Celles-ci s’organisent autour de deux axes : la prévention des risques et les moyens de réponse en cas de crise.

Dans le cadre de la prévention des risques, différentes mesures peuvent être mises en place afin de minimiser les dégâts occasionnés par une catastrophe. Les zones à risque sont identifiées afin d’y limiter les activités humaines, en particulier la construction de logements et d’infrastructures sensibles. Les pouvoirs publics mettent ainsi en place des plans de prévention des risques (PPR) couvrant tous les types de risques possibles et pour chaque zone à risque (plans établis le plus souvent au niveau communal et portant sur un type de risque particulier). En France la plupart des PPR concernent les zones inondables, les zones d’avalanche et les zones industrielles. De la même façon, diverses structures soutenues par l’Etat sont en charge de l’observation des phénomènes naturels et alertent en cas d’événement exceptionnel (Météo France pour les événements climatiques, Bureau Central Sismologique Français pour l’activité sismique, ESA et NASA pour l’observation de l’activité des corps célestes, etc.). Cependant le déclenchement et l’ampleur de certains phénomènes restent difficilement prévisibles (séismes, inondations) et les pouvoirs publics doivent donc préparer des moyens de réponse en amont.

L’organisation de ces moyens implique différentes mesures, telles que la formation des populations civiles (exercices, formations sur la réduction des risques, information) ainsi que la mise en place de moyens humains et matériels adaptés (équipements de secours en nombre suffisant, formation de personnels de secours, anticipation des chaînes logistiques visant à prendre en charge les sinistrés). Cependant certaines catastrophes échappent toujours partiellement au principe de réduction des risques, notamment les événements célestes. Dans ce cadre, la recherche scientifique a récemment beaucoup progressé (exemple de la mission Dart en septembre 2022).